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Qu’est-ce que la « santé positive » ?

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Quels leviers pour les bâtiments, les espaces de travail, les territoires et les lieux de soin ? Les multiples transitions sociétales – démographiques, épidémiologiques, urbaines, numériques, influencent le champ de la santé et génèrent de nouveaux défis.
Comment allonger l’espérance de vie en bonne santé d’une société vieillissante ? Comment transformer nos modes de vie pour une meilleure santé et la réduction du poids des maladies chroniques ? Comment apaiser les angoisses dans une société multirisques et rééquilibrer l’état psychologique des Français, dégradé par la crise sanitaire ? Autant de questions explorées par la Fabrique Spinoza, think-tank consacré au bonheur citoyen, dans son étude « Santé positive. Guide des déterminants scientifiques aux citoyens, professionnels et institutions », dont Bouygues Construction est partenaire.   
Détacher la santé du pur domaine médical, au profit d’une approche globale et d’une éthique du care (« prendre soin ») : c’est la conviction de cette étude, qui propose plusieurs pistes pour y parvenir : mobiliser les déterminants ou les facteurs de santé sous-utilisés, revaloriser la santé mentale, réenchanter les lieux de santé et réengager le patient. 
 

Les émotions et les relations sont essentielles à notre bien-être 

Elles influencent notre santé physique, psychologique, comportementale et sociale. Les émotions « positives » renforcent par exemple le système immunitaire, protègent du stress et améliorent la qualité des relations. La Harvard Study, l’une des plus importantes études sur la vie adulte1, en témoigne. Elle révèle que les relations sociales solides sont de meilleurs prédicteurs de vies longues et heureuses que la classe sociale, le QI et la génétique. Les relations ont donc un réel pouvoir de santé, qu’il s’agisse de la relation à soi, aux autres ou aux soignants.   La relation aux soignants se transforme en même temps qu’apparaissent les prémices d’évolution d’une médecine qui soigne vers une médecine qui prend soin. Il s’agit de replacer le soin et l’humain au cœur du travail et de prendre soin des soignants. Aux Pays-Bas, l’entreprise Buurtzorg de soins infirmiers à domicile a fait le choix de l’autonomie et d’un équilibre vie professionnelle / vie personnelle facilité pour les équipes d’infirmiers et d’auxiliaires de vie, loin des modèles de rationalisation excessive du travail des infirmiers. Grâce à ce virage, l’absentéisme a fortement décru, les professionnels ont gagné en fierté au travail et sont plus disponibles pour leurs patients. Des dispositifs similaires émergent dans le secteur hospitalier public, à l’instar de la plateforme HoptiSoins qui propose des offres bien-être à tous les professionnels de l’AP-HP et met en place une « bulle » de décompression à l’hôpital Cochin, à Paris.    

Les déterminants d’une vie saine : ajuster les modes de vie 

L’alimentation, l’activité physique, le sommeil et la vie sexuelle sont des facteurs de santé bien connus et pourtant souvent négligés. Les bienfaits associés sont significatifs et appellent à revoir nos habitudes pour ajuster nos modes vie vers une existence plus saine. Les chiffres sont éloquents : en 40 ans, les jeunes ont perdu 25% de leurs capacités cardiovasculaires ; actuellement, on estime qu’un Français sur deux est en surpoids ; 80% des Français déclarent être fatigués dans la journée.   Comment agir ? De nombreux dispositifs se développent à l’échelle des territoires, des entreprises et des milieux médicaux et hospitaliers. Pour encourager l’activité physique et sportive, des villes élaborent des plans piétons pour améliorer leur marchabilité. C’est le cas de Strasbourg, première ville à se doter d’un plan piéton, ou de Sceaux (Hauts-de-Seine), qui après avoir entièrement piétonnisé l’un de ses quartiers, travaille aujourd’hui à la création de continuités piétonnes entre la gare RER et le centre-ville. La planification territoriale permet également d’agir sur l’alimentation. En 2018, la mairie de Londres a ainsi pris la décision d’interdire l’implantation de fast-food dans un rayon de 400 mètres autour des établissements scolaires et de proposer un paysage alimentaire plus équilibré aux élèves à la sortie des cours.   Au-delà des collectivités, de multiples acteurs peuvent contribuer à favoriser l’évolution des modes de vie. Soigner par le sport : c’est le principe du sport-santé sur ordonnance. Depuis 2016, la loi autorise les médecins à prescrire une activité physique et/ou sportive aux patients concernés par des Affections de Longue Durée (diabète de type 2, obésité, cancers du sein et du colon en rémission, maladies cardiovasculaires stabilisées, etc.). A l’image de Sète, plusieurs Villes initient ce type de dispositifs et coordonnent l’action entre professionnels de santé et clubs sportifs, accompagnées par des éducateurs sportifs spécialisés au sein de leurs services.   Bouger et être en mouvement contribue au bien-être physique mais aussi mental, en faisant appel à notre sensorialité à travers la proprioception (perception, conscience ou non, de la position de notre corps dans l’espace, qui peut être considérée comme un sixième sens). Des entreprises reconfigurent leurs locaux en s’inspirant du design actif, c’est-à-dire en donnant envie aux usagers de choisir une façon active de se déplacer. C’est dans cet esprit que 100Architects est intervenu pour reconfigurer le hall du siège social d’une entreprise en introduisant des éléments ludiques (toboggan, balançoire), des éléments graphiques incitant au mouvement (flèche miroir, couleurs vives) et en invitant le mélange des usages dans un même espace (détente et déplacement).    

La santé au travail : un impératif renouvelé 

La santé au travail est un impératif renforcé par la crise sanitaire. La pandémie s’est accompagnée d’une dégradation de la santé des travailleurs, sur le plan mental (doublement du taux de burn out, risques psychosociaux 2ème cause d’arrêt de travail après le coronavirus en 2020) et physique (en télétravail, 42% des travailleurs se déplacent peu ou pas du tout et 54% ont des douleurs dans le bas du dos quand ils travaillent chez eux). L’environnement de travail peut contribuer à la santé et au bien-être en quelques principes d’action simples : ergonomie matérielle et sociale, espace de travail adapté, biophilie, bonnes pratiques digitales, …  Les bienfaits de la proximité aux éléments naturels (air extérieur, lumière naturelle, eau, végétation, …) est démontrée dans de nombreuses études. Des chercheurs estiment à 6% la réduction de l’absentéisme par le seul accès à la lumière naturelle et à une vue sur l’extérieur.   Le travail influence la santé cognitive via la conception et l’aménagement de bureaux fonctionnels. Les espaces de travail s’organisent sur un principe ergonomique via le concept d’Activité Based Working. Ce dernier repose sur le choix des usagers à décider de l’environnement dans lequel ils souhaitent travailler en fonction de leurs différentes activités, tout au long de la journée. L’agencement est revu pour proposer une diversité d’espaces : espaces communs pensés comme des places publiques, espaces pour de petits groupes de travailleurs amenés à se côtoyer sur de longues périodes, espaces pour les projets collaboratifs ponctuels, alcôves pour se détendre, espaces individuels pour téléphoner ou participer à une visioconférence, espaces bien-être en intérieur ou extérieur (postes pour travailler débout, bureau dehors, zone de méditation, …).  Le travail prend également en compte l’ergonomie sociale afin d’encourager les relations humaines. Il s’agit d’organiser le flux convivial de personnes, de privilégier de petites unités de travail, de créer des espaces de convivialité, animer les espaces interstices et les zones de circulation par le nudge. Des dispositifs non spatiaux sont également envisageables tels que la mise en place d’un ou une Chief Happiness Officer pour dynamiser les liens de convivialité.    

Une vie sensible : l’Art, source de santé 

L’art, sous différentes formes, peut soigner, soulager, libérer, contribuer tant à l’épanouissement qu’à la guérison. Si les approches d’art-thérapie (processus créatif de transformation de soi qui propose des pratiques multiples de l’Art comme acte de soin) sont relativement connues, d’autres pratiques émergent à l’image de la muséothérapie qui porte une approche culturelle de l’Art en source de santé rapprochant le muséal du médical. Les Médecins membres Francophones du Canada ordonnent des prescriptions muséales en partenariat avec le Musée des Beaux-Arts de Montréal. La pratique arrive en France où des médecins de l’Institut de Cardiologie de la Pitié Salpêtrière peuvent prescrire des visites au Château de Compiègne.   En milieu hospitalier ou médico-social, l’art s’invite également sous la forme de fresques murales, l’accueil d’activités artistiques ou dans les corridors en offrant des parcours artistiques et culturels au cœur de l’hôpital. Le CHU de Lyon, pour sa part, propose à des patients de choisir une œuvre d’art pour leur chambre et observent une amélioration de l’humeur et une diminution des antalgiques et antidépresseurs.     Pour conclure, ces différents leviers ne peuvent s’exprimer pleinement qu’à condition de susciter l’engagement des individus. Dans une approche globale de santé, cet engagement peut se traduire dans tous les domaines de la vie quotidienne : cadre de vie, alimentation, mobilité, relations sociales, sommeil, etc. Les lieux de soins se réinventent, dans une logique d’hyper-proximité et de santé positive offrant une large place à la prévention et au bien-être, à l’instar des maisons pluri-professionnelles de santé ou de tiers-lieux de santé ouverts sur la ville et accessibles à tous.