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L’interview du mois : Xavier Rodarie, Directeur Développement des Territoires et de l’Economie Inclusive

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Xavier Rodarie, Directeur Développement des Territoires et de l’Economie Inclusive, nous présente la démarche « Le Logement Solidaire » initiée par Habitat Social au sein de l’Action Tank Entreprise & Pauvreté.
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Qu’est-ce que l’Action Tank Entreprise & Pauvreté et pourquoi Habitat Social a-t-il choisi de s’y impliquer ?

Créé en 2010 à l’initiative de la Chaire Social Business d’HEC, l’Action Tank Entreprise & Pauvreté est un laboratoire d’expérimentations sociales au service du développement d’une économie plus inclusive. Il réunit entreprises, associations et monde académique autour d’un objectif commun : contribuer à la réduction de la pauvreté et de l’exclusion en France par le développement de projets économiquement soutenables, susceptibles d’être déployés à grande échelle. Habitat Social a rejoint l’Action Tank en 2012 avec la volonté de mobiliser cet écosystème d’acteurs autour de son projet « Le Logement Solidaire » dont le but est d’accompagner les territoires dans le développement de logements mieux adaptés et plus abordables pour leurs habitants. Ceci en respectant les valeurs de l’économie inclusive : cibler des publics en situation de précarité ou d’exclusion, adopter une logique de co-conception entre acteurs et faire passer l’utilité sociale avant le profit. Xavier-Rodarie

Qu’est-ce qui a motivé le lancement de ce projet et quels sont les objectifs ?

Le projet part du constat de la crise du logement en Ile-de-France, région où l’offre est très inférieure aux besoins estimés, où les niveaux de loyers sont inadaptés à la demande et où 350 000 ménages ont un reste-pour-vivre (une fois l’ensemble des dépenses liées au logement effectuées) inférieur au seuil minimal préconisé par la Région Ile-de-France (14€/jour par unité de consommation). Pour contribuer à résoudre cette crise, le projet vise à diminuer le coût global du logement social et à optimiser le reste-pour-vivre des futurs habitants tout en garantissant la qualité du bâtiment et la viabilité économique des opérations.

Vous proposez pour cela de renverser le processus de conception d’opérations de construction de logements en partant de l’analyse des besoins réels du territoire. Quels sont les piliers de cette méthode ?

Nous travaillons à chaque fois à l’échelle d’une commune donnée avec une méthode d’analyse des besoins du territoire. Nous débutons par l’analyse de l’adéquation offre-demande de logements sur le territoire afin d’identifier les typologies de logements les plus en tension et les profils des demandeurs de logements ayant le plus de difficultés à accéder au parc locatif social. L’inadéquation offre-demande peut être quantitative (ex : insuffisance du nombre de logements T1 pour loger des personnes seules sans enfant), qualitative (ex : niveau de coût des T3 et T4 inadapté pour loger des couples avec enfants) ou les deux à la fois. Ce bilan permet d’identifier les publics cibles les plus exclus du parc social et de dresser des propositions programmatiques pour le territoire. Pour chaque couple public cible/typologie identifié, nous fixons un montant objectif de loyer + charges en visant une diminution du taux d’exclusion des publics ciblés, grâce à des modèles et à l’analyse des données locales. Ce montant, partagé avec le Bailleur et la Ville, sert d’objectif à la conception et au montage financier des projets. Lors du lancement d’un projet de construction de logements sur le territoire communal, nous évaluons le coût global d’un logement sur 50 ans grâce à un outil de modélisation mis en place par l’Action Tank et Habitat Social et nous mesurons son écart avec le montant objectif fixé de loyer + charge. Pour diminuer le coût global, nous travaillons en co-conception avec tous les acteurs concernés (maître d’ouvrage, collectivité locale, maîtrise d’œuvre, législateur, constructeur, exploitant, locataire), en agissant à tous les niveaux (foncier, construction, financement, utilisation et maintenance) et en choisissant les bons leviers : utiliser des sols à très haute dureté, faire faire certains travaux d’entretien par le locataire, individualiser la facture d’eau froide, …

Où en est la démarche et a-t-on des retours d’expérience ?

Trois collectivités (Guyancourt dans les Yvelines, Grigny dans l’Essonne et Stains en Seine-Saint-Denis) nous ont proposé des terrains d’expérimentation pour conduire des opérations en suivant cette méthode et en allant jusqu’à son évaluation. Nous avons constitué les équipes sur ces projets et nous débutons les conceptions. Il restera, pour terminer cette expérimentation, à mesurer l’impact dès la première mise en chantier afin de vérifier la baisse du coût global, la pertinence du ciblage des publics et l’augmentation du reste-pour-vivre des habitants.