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Le bureau face au travail hybride

5 minutes de lecture
Dans un monde où l’on peut travailler depuis chez soi ou à l’autre bout du monde, à quoi ressemble le bureau ? Dans un précédent article, nous vous parlions des ateliers que l’équipe Prospective de Bouygues Construction conduit avec de nombreux acteurs pour comprendre les transformations des modes de travail et leurs impacts sur les lieux de travail. Aujourd’hui, intéressons-nous aux transformations du bureau pour s’adapter au travail hybride.
La crise sanitaire a mis en lumière l’évolution des pratiques et méthodes de travail, et en particulier le développement du travail à distance, d’abord sous une forme dégradée de télétravail imposée par les mesures de confinement face au virus. De manière plus générale, Le télétravail correspond à toute forme d’organisation du travail dans laquelle un salarié peut effectuer au moins une partie de ses tâches hors des locaux de l’entreprise – au domicile comme ailleurs – via les technologies de l’information et de la communication. Mis au point dans les années 1970 puis facilité par le développement du réseau internet, le télétravail s’est développé progressivement dans les années 2000 et 2010, de manière très hétérogène selon les secteurs, cultures et dimensions d’entreprises. En France, on estime que les tâches réalisables au moins en partie en télétravail concernent aujourd’hui entre 36% et 40% des actifs.

Les collaborateurs au cœur d’une diversité de modèles hybrides

Le modèle d’un lieu de travail unique de référence est questionné par cette possibilité de réaliser certaines tâches à distance : aujourd’hui, bureau, logement et tiers-lieu se complètent. Les entreprises font alors face à un choix : mettre en place un cadre, entre rigidité (organiser les temps et lieux de travail par la contrainte) et souplesse (laisser la liberté à chacun de s’organiser au mieux), afin que la diversité de ces lieux devienne source d’opportunité plutôt que de contrainte. La bonne réponse dépend donc de l’activité et de la culture de chaque entreprise. Toutefois, à la sortie d’une période d’expérimentation contrainte du distanciel, avec ses aspects négatifs et positifs, il apparaît que les échanges à distance resteront plus courants qu’avant la crise sanitaire : il apparaît que les personnes aux tâches télétravaillables de grandes entreprises ont pour certains acquis la possibilité de télétravailler un, deux, voire trois jours par semaine. Il ne sera dans ce contexte pas toujours possible de faire des réunions 100% en présentiel ni 100% en distanciel, même dans les entreprises privilégiant largement la présence physique au bureau. Comment faire face à cette situation hybride ?

Une salle de réunion qui laisse une place au distanciel

La collaboration phygitale, c’est-à-dire l’hybridation présentiel-distanciel, est un usage nouveau qui conduit à changer l’aménagement des bureaux. Le besoin d’échanger entre différents sites est globalement amené à perdurer. Faciliter l’interface présentiel-distanciel nécessite de faire évoluer les espaces de bureau afin de limiter les sentiments d’exclusion du groupe minoritaire, ou la perte de communication que peut engendrer une communication hybride. Google a par exemple dévoilé en mai 2021 ses nouveaux aménagements de bureaux dans un article fleuve du New York Times[3]. Une partie des aménagements visent à faciliter la collaboration phygitale. L’expérimentation de salle de réunion « Campfire » testée en 2021, est destinée à encourager une participation égale des employés en présentiel et à distance, en incluant des places physiques pour les personnes en distanciel, et permettant de voir les personnes à distance à l’échelle 1 sur des écrans dédiés, comme s’ils étaient assis sur place. La stratégie de Google passe aussi par des espaces de travail dédiés à une équipe, larges et modulables selon les besoins afin de les rendre plus ou moins orientés vers la coopération ou la concentration, et qui comportent des écrans dédiés à l’affichage de l’image des membres de l’équipe travaillant à distance.

Un espace pour chaque usage et une fenêtre vers d’autres lieux

La Vitre propose de transformer un grand écran de visioconférence vertical en fenêtre vers un ou plusieurs autres sites. Le format vertical permet de voir ses interlocuteurs de la tête aux pieds et à une dimension s’approchant de l’échelle 1. Cela permet de réunir les équipes à distance sur un mode d’échange plus naturel et spontané que la visioconférence, que ce soit pour des échanges formels ou informels. Des fonctionnalités facilitent en complément le partage d’écrans de PC, tablettes et téléphones, tandis que la traduction instantanée permet de sous-titrer les conversations avec des collègues à l’international en 60 langues. Au-delà de la facilitation des échanges à distance, le bureau se transforme aussi pour permettre d’aménager des espaces dédiés à un seul usage. Aujourd’hui la réflexion menée autour de l’«Activity-based workplace » tend à généraliser l’idée que le collaborateur ne se contente plus d’un type d’espace mais doit pouvoir conjuguer l’utilisation de plusieurs espaces différents tout au long de sa journée. En effet, le collaborateur doit pouvoir décider d’occuper l’espace qui lui convient le mieux à un instant t afin de s’adapter à la diversité de ses tâches : concentration au calme, lecture d’une documentation, appel téléphonique, visioconférence travail en équipe dans un cadre souple autorisant les discussions, rendez-vous, réunion formelle, comité, brainstorming, etc. Ce bureau aménagé par usage est le plus souvent accompagné d’un passage en « flex office » où les bureaux ne sont plus attribués pour chaque collaborateur.

Le bureau, un écosystème de lieux ?

Ce nouveau paradigme fait apparaître la possibilité de migrer entre différents espaces pour travailler efficacement. Cette idée dépasse le cadre du seul bureau : pour les entreprises, bien penser le lieu de travail ne se résume alors plus à concevoir un bâtiment unique, mais à offrir un écosystème de lieux permettant de faciliter et de fluidifier le travail de ses collaborateurs, partagé entre présence au bureau, déplacements et télétravail. En complément du bureau, l’entreprise se doit donc de penser les modes de travail en interaction avec les possibilités des logements de leurs collaborateurs, et en proposant des lieux de travail complémentaires : les tiers-lieux offrent à ce titre de multiples propositions de valeur, comme nous vous l’expliquons dans une note de tendances synthétique : les tiers-lieux de proximité permettent aux collaborateurs de travailler dans un espace de qualité proche de chez soi, tandis que d’autres offrent des solutions servicielles, mutualisées, ou encore liées à la mobilité.

Les enjeux du bien-être et de la santé au cœur des réflexions

Au cœur des réflexions concernant le bureau et l’écosystème de lieux de travail, la qualité de vie des collaborateurs apparaît comme une question stratégique. La crise sanitaire a renforcé ces préoccupations. Considérant que les lieux et modes de travail doivent garantir la santé physique mais également mentale des collaborateurs, l’application de protocoles sanitaires, la présence de services de santé, de psychologues du travail, le monitoring d’indicateurs de confort (qualité de l’air, température), la mise en place de politiques pour l’inclusion, pour l’égalité, pour le respect des rythmes de travail, sont autant de vecteurs possibles pour répondre à ces défis. Le bureau tend à devenir un espace fédérateur, serviciel, facilitateur de vie, convivial, égalisant, point de repère et respectueux de la santé et du bien-être des collaborateurs. De ce point de vue, les essentiels d’un bon aménagement de bureau font appel à la lumière naturelle, à la limitation du bruit, à la régulation thermique et au confort ergonomique pour favoriser la santé. Le respect de l’intimité par un dimensionnement généreux de l’espace par utilisateur présent au bureau participe là-aussi à la qualité de vie au travail. Certains vont au-delà : un aménagement doté de plantes et d’autres éléments naturels participe au bien-être au bureau, tout comme la présence d’espaces de convivialité et de rencontre informelle.

« Au bureau, mieux qu’à la maison »

De manière plus surprenante, enfin, l’art fait incontestablement partie de l’amélioration du cadre de vie des collaborateurs. Selon le rapport de l’OMS de 2019, il favorise un état de bien être émotionnel et réduit le stress. Jean-Pierre Changeux, professeur en neurosciences au Collège de France,  confirme : « la contemplation d’œuvres d’art développe des aptitudes cognitives et créatives ». Un aménagement de bureau artistique est également un marqueur de l’attention que l’employeur porte au bien-être des occupants de ses bureaux, et offre un sujet d’échanges et d’inspiration extérieur au quotidien du travail. Parmi ces nombreuses pistes, lesquelles seront les plus suivies dans les années à venir ? Pour faire vivre leur collectif de travail rassemblé dans un lieu adapté, on peut estimer que les entreprises adopteront en tout cas l’expression « Au bureau, mieux qu’à la maison » !   [1] Etude réalisée par Harris Interactive pour le ministère du Travail auprès de 2 004 personnes représentatives des Français âgés de 18 ans et plus, Novembre 2020. [2] Observatoire des usages et représentations des territoires – Edition n°3, L’ObSoCo, en partenariat avec Chronos, Bouygues Construction, l’ADEME, Septembre 2021. Etude basée sur sondage auprès de 4000 personnes représentatives des Français âgés de 18 à 75 ans, Juin 2021. [3] https://www.nytimes.com/2021/04/30/technology/google-back-to-office-workers.html