fbpx

L’interview du mois : Louise de la Guéronnière, développeuse immobilier chez Losinger Marazzi

2 minutes de lecture
Louise de la Guéronnière, développeuse immobilier chez Losinger Marazzi nous présente la démarche Méthodes et Outils de Développement Durable (MODD) au service de l’aménagement de quartiers durables.
l'interview shared innovation

La démarche MODD tire son origine du projet de recherche Atequas (Atelier des Quartiers Soutenables) mené par l’Institut Transform à la Haute Ecole d’Ingénierie et d’Architecture de Fribourg (HEIA), en Suisse. Quel était l’objectif de ce projet de recherche et qu’apporte un tel partenariat entre l’université et l’entreprise sur ce sujet ?

Le projet de recherche Atequas avait pour objectif la mise en place d’un outil d’aide à la décision et à la conception pour aider les acteurs à transcrire de façon opérationnelle les enjeux du développement durable à l’échelle du quartier. Pour l’HEIA, l’objectif du partenariat avec Losinger Marazzi était de tester en pratique, sur des cas concrets d’éco-quartiers, les résultats de ces recherches. Un rapprochement université – entreprise encouragé et facilité par la Commission pour la Technologie et l’Innovation (CIT), agence pour la promotion de l’innovation de la Confédération helvétique, qui encourage les projets de Recherche appliquée & Développement (Ra&D). Pour l’entreprise, l’enjeu était de disposer de méthodes et d’outils issus de la sociologie afin de mieux prendre en compte la dimension sociale dans la conception des éco-quartiers, souvent moins bien maîtrisée que les dimensions environnementale et économique. Développer un urbanisme adapté aux différents types de population et favoriser une cohabitation harmonieuse entre ces populations est d’autant plus important dans les projets d’éco-quartiers qu’ils visent des objectifs de densité et d’intensité élevés. Dès lors, comment créer les conditions pour une densification optimale et acceptable qui préserve la qualité de vie de chacun ? interview Louise de la Guéronnière

La réponse envisagée dans ce projet de recherche appliquée est de se baser sur une analyse fine des caractéristiques sociologiques des populations afin de mieux comprendre leurs modes de vie, leurs usages et leurs besoins. Comment cette analyse a-t-elle été menée ?

L’HEIA s’est inspirée des travaux de Marie-Paul Thomas, du Laboratoire de Sociologie Urbaine (Lasur) de l’Ecole Polytechnique Fédérale de Lausanne (EPFL) pour établir une typologie de profils sociologiques d’habitants et d’identifier leurs préférences dans leurs manières d’habiter un logement, une résidence et un quartier. Une grande enquête a été réalisée auprès d’habitants de plusieurs quartiers existants afin de cerner le fonctionnement du quartier, les conditions des relations entre habitants, le ressenti des habitants et leurs modes de vie dans le quartier. Des données qualitatives telles que le degré d’urbanité acceptable par les habitants, la qualité de vie associative ou les préférences en matière de mobilité ont été collectées et articulées afin de dessiner la typologie. Les « alternatifs établis » ont par exemple un style de vie orienté vers l’épanouissement personnel. Ils ont une forte conscience écologique et sociale et un intérêt prononcé pour la culture. Habitant en ville ou en proche banlieue, ils accordent plus d’importance à la dimension créative et culturelle de leur voisinage qu’à la propriété immobilière. Ils vont particulièrement rechercher des quartiers compacts offrant une vie culturelle dynamique et des habitats proposant une importante dimension de partage : colocation, logements intergénérationnels ou espaces collectifs mutualisés. Chaque profil ainsi défini est décrit dans un carnet d’observation permettant de mieux cerner les attentes des populations concernées.

Passons de la théorie à la pratique : comment ces outils sont-ils utilisés lors de la conception de nouveaux quartiers ?

L’HEIA a accompagné Losinger Marazzi dans le cadre de cinq projets de quartiers en Suisse romande afin d’appliquer la méthode à des cas concrets d’aménagement de quartiers. La première étape consiste à déterminer en amont du projet quels types de profils sont susceptibles de s’installer dans le futur quartier en tenant compte du contexte territorial, des profils de population dans les quartiers voisins, des tendances de peuplement à l’œuvre et de la volonté politique locale d’intervenir ou non pour faire évoluer ces tendances. Il s’agit ensuite de croiser cette composition sociale attendue du quartier avec les profils sociologiques issus de la phase de recherche pour anticiper les besoins et usages des futurs habitants et les interactions et points éventuels de tensions entre les différents profils de population. Cette matière constitue un outil de programmation précieux pour mieux adresser les enjeux : quels aménagements et organisations proposer pour satisfaire l’ensemble des futurs habitants ? Où positionner les espaces publics ? Comment répartir les différents profils de population dans le quartier pour une cohabitation harmonieuse ? Un outil au service de la qualité d’usage des futurs quartiers et qui offre des clés pour concevoir le quartier avec une véritable vision d’urbaniste. Nous sommes en train de capitaliser sur cette initiative en rédigeant un guide méthodologique et la méthode est d’ores et déjà en cours de réplication dans le contexte français.