Loin de constituer une simple réplique 3D d’un territoire, le jumeau numérique agrège des données multiples (réglementaires, géospatiales, environnementales, d’usages, mais aussi données en temps réel issues des capteurs) pour constituer une représentation de la ville ou du territoire et créer de l’information qui guidera l’action. Architecture, urbanisme, usages et leurs conséquences (prix immobiliers, pollution, …), réseaux et leurs flux, ressources du sous-sol et couches géologiques sont susceptibles de figurer dans ce type d’outil. En termes de stratégie de développement, de planification urbaine, de simulation et de gestion de crise (jouer des scenarii de perturbation), ou de gestion au quotidien, le jumeau numérique offre un potentiel presque illimité d’applications. D’où l’importance de bien définir les besoins en termes d’usages et de périmètres géographiques, comme le recommande la Banque des Territoires dans son guide à l’attention des collectivités : « Le jumeau numérique est une solution, une réponse à un besoin mais n’est pas un objectif « en soi », la démarche de définition des besoins et des objectifs est donc fondamentale ».

. Cas d’usage de collectivités pionnières

À Helsinki, l’outil Helsinki 3D+ est utilisé pour créer des simulations de phénomènes physiques notamment les simulations 3D de la dynamique des flux du vent, la simulation de l’apport solaire et la simulation des ombres portées au sol dans le cadre de ’aménagement de l’éco-quartier de Kalasatama. C’est aussi un outil puissant pour transformer les organisations, en raison de son approche systémique et de sa capacité à fédérer autour d’un référentiel commun. Source unifiée de données sur le territoire, il peut favoriser la collaboration entre les services et le désilotage des métiers : et contribuer à la mise en œuvre de politiques systémiques, plus efficaces. C’est par exemple l’un des objectifs affichés de Rennes Métropole, à travers le déploiement de son outil 3DEXPERIENCity Virtual Rennes.

. Une nécessaire démarche d’appropriation de l’outil

Néanmoins, comme le rappelle la Banque des Territoires, la mise en œuvre d’un jumeau numérique nécessite une véritable maturité de la collectivité en matière de conduite de projets de transformation digitale. Ainsi que la réalisation d’une analyse de risques et d’opportunités au regard des enjeux éthiques, juridiques, économiques, de choix technologiques, de gouvernance et de cyber-sécurité liés à ce type de projets. « Le jumeau numérique est une technologie avec un potentiel très important pour les collectivités et les acteurs du territoire » explique Chloé Friedlander, chargée de mission Smart city à la Banque des Territoires. « Pour une bonne appropriation et intégration du jumeau dans la collectivité, une approche pas à pas est recommandée. Il est indispensable que la collectivité commence par acquérir et maîtriser son socle de données 3D, puis que les services puissent développer des cas d’usage selon leurs besoins, tout en apprenant à utiliser eux-mêmes les applications. »  

Expérimentation à la Grande Motte

À la Grande Motte, Bouygues Energies & Services mène actuellement une expérimentation de jumeau numérique réalisée dans le cadre d’un partenariat noué entre Dassault Systèmes et Bouygues Construction. Cette plateforme « 3DExpérience » sert, comme à Rennes, de support au jumeau numérique. Cette fois-ci, le partenariat permet d’adapter l’outil aux besoins de l’exploitation maintenance d’un territoire. La plateforme est notamment testée pour la gestion de l’éclairage public en vue d’en réduire les coûts. Afin de mieux anticiper et visualiser les potentiels dysfonctionnements (comme par exemple, une ampoule défectueuse), la ville a été modélisée en 3D dans une maquette numérique sur laquelle figure chaque élément géré ainsi que de multiples données s’y rapportant (localisation, consommation énergétique, etc.). S’il reste encore beaucoup à expérimenter, les jumeaux numériques des territoires se dessinent déjà comme un véritable atout au service de la gestion, et peut-être même, l’avenir nous le dira, de la résilience des territoires.