fbpx

[Panorama Villes Durables] #1 La gestion de l’eau en Australie, le modèle des water sensitive cities

5 minutes de lecture
en partenariat avec
Confrontée de longue date aux différentes problématiques de l’eau en ville, L’Australie réfléchit depuis de nombreuses années à mieux concevoir les espaces urbanisés afin d’organiser le cycle urbain de l’eau.
best western olde maritime warrnambool hôtel motel hébergement vue aérienne

L’eau en milieu urbain

L’eau est un présupposé à tout développement urbain. La gestion de l’eau a donc toujours été une problématique majeure pour les villes. Ces dernières ont entre autres la responsabilité de gérer et de sécuriser l’approvisionnement et la qualité de l’eau mise à disposition, ou d’assurer la pérennité de l’eau en ville en adaptant le milieu urbain aux différentes sources (cours d’eau, voies navigables, fleuves, eaux pluviales, eaux souterraines, mers, océans…). Cela afin de permettre des développements sociaux et économiques durables. C’est-à-dire in fine d’assurer une bonne qualité de vie de ses habitants. Depuis plusieurs années, les villes des quatre coins du globe sont confrontées au même double défi. D’un côté une démographie galopante entraînant une urbanisation qui n’en finit plus, avec une taille moyenne des villes qui augmente partout dans le monde. Et de l’autre un climat qui change irrémédiablement et des phénomènes météorologiques de plus en plus extrêmes localement comme des canicules prolongées ou des inondations violentes. Ce à quoi les milieux urbanisés ne sont pas préparés. La croissance démographique entraîne mécaniquement une pression sur les ressources en eau. Sur une même zone, il y a plus d’habitants, plus d’entreprises et d’industries, plus d’entretien nécessaire. Bref, une demande plus forte pour des ressources qui restent au mieux stables. Ou au pire – et dans la majeure partie des cas – en tension à cause du réchauffement climatique. Mais également du fait que l’extension des zones urbanisées a profondément modifié la nature locale, ce qui s’est traduit par une artificialisation et une imperméabilisation des sols contraignant le cycle naturel de l’eau en bout de processus. Par exemple, les précipitations sont de plus en plus intenses mais s’évacuent mal à cause de systèmes qui n’ont pas été pensés pour faire face à ces épisodes. Cela engendre des inondations. Les villes deviennent alors les victimes de leur propre développement, de leur propre densité. A cela s’ajoutent les problèmes de pollution des eaux. Car lors du ruissellement des eaux pluviales, ces dernières peuvent être contaminées par des pollutions diverses issues des villes avant de se déverser dans les milieux aquatiques naturels, fleuves ou océans. Comparaison des paysages naturels et urbains du cycle de l'eau et des rues dans les villes conventionnelles et bleues-vertes  

Les water sensitive cities australiennes

Une WSC est une ville qui a su (ou qui est en train de) mettre en place un système global de gestion de la ressource en eau (approvisionnement, écoulement, drainage, réutilisation etc) afin que les habitants continuent d’avoir une bonne qualité de vie et que la ville puisse continuer à se développer. En un mot, que la ville soit et reste vivable. Ce concept des WSC est né en Australie, région du monde fortement sujette aux conséquences du réchauffement climatique, particulièrement confrontée aux problématiques liées à l’eau, et dont plus de 90% de la population vit en zone urbaine. La gestion de l’eau apparaît donc comme essentielle pour les villes et métropoles australiennes depuis de nombreuses années. Sur le sujet du ruissellement des eaux pluviales, les premières réflexions datent du début des années 90. A l’époque les premiers systèmes acheminaient les eaux de pluie rapidement et directement vers les milieux naturels sans questionner la préservation des écosystèmes en aval des pollutions issues des surfaces imperméables des zones urbanisées. Afin de minimiser l’impact sur l’environnement et permettre aux villes de transformer cette eau en ressource, les urbanistes ont revu leurs copies en essayant une approche plus intégrée de la gestion de l’eau. C’est ce qu’on appelle le concept de Water Sensitive Urban Design (WSUD), concept qui intègre le cycle de l’eau urbaine directement dans la conception globale de la ville. En considérant l’eau comme une ressource, cela permet d’adapter ou de mieux concevoir les espaces urbanisés. Afin d’encadrer ces recherches et d’étendre les champs des réflexions à tous les aspects de la ressource eau, le Cooperative Research Centre for Water Sensitive Cities (CRCWSC) a été créé en juillet 2012. Il permet de faciliter les échanges et les collaborations entre professionnels, industriels, scientifiques et communautés locales. L’objectif est rechercher et de tester des solutions d’adaptation, et d’essayer de les diffuser le plus possible afin d’assurer une résilience des villes de demain dans le domaine de l’eau.  

Des projets partout dans le pays

L’objectif des WSC australiennes est de travailler sur l’efficacité de l’utilisation de l’eau, d’en diversifier les captages, d’en améliorer la qualité et de protéger les milieux naturels en amont et en aval des villes des pollutions. Généralement, plusieurs types d’aménagements sont mis en place. Parmi lesquels des projets de création de zones humides, d’espaces paysagers plus économes en eau, de réservoirs d’eau, la mise en place de bassins de rétention et de sédimentation, d’espaces bio filtrants ou de tranchées d’infiltration qui permettent de contrôler le débit et d’améliorer la qualité de l’eau. Voici quelques exemples. A Perth, le cours d’eau urbain Bannister a été restauré et revitalisé grâce à des travaux de terrassement, au retour des terres humides, à une revégétalisation du bras urbain. Le cours d’eau a repris une forme naturelle avec des méandres et des rapides. Cela a permis d’améliorer l’écoulement des eaux pluviales, de pouvoir faire tampon sur les possibles inondations, et d’améliorer la qualité de l’eau. Les communautés locales ont pris également le sujet en main, ce qui permet de pérenniser le projet. De la même manière, une partie des rivières Cooks à Sydney, Bendigo à Victoria et Small Creek à Ipswich ont été renaturalisés. Des bords de berge en béton ont été supprimés et des zones humides ont été recréées. A Lyndhurst dans la banlieue de Melbourne, un nouveau concept de quartier voit le jour sous le nom d’Aquarevo. L’association de bonnes pratiques et des nouvelles technologies va permettre de réduire jusqu’à 70% de la consommation en eau potable de chaque nouvelle maison, grâce à des systèmes de récupération et de traitement des eaux usées et pluviales directement sur site. A Warrnambool, on collecte l’eau des toits des nouveaux bâtiments ou habitations, afin de la diriger vers un bassin où elle sera traitée, filtrée et rendue potable. Même son de cloche à Orange dans la région aride de la Nouvelle Galles du Sud, où l’enjeu est de sécuriser l’approvisionnement en eau potable. Ainsi la collecte et le traitement des eaux pluviales permettent l’approvisionnement de 25% de l’eau potable de la ville. Ainsi, les projets sont légions dans un pays contraint de réfléchir depuis longtemps à ces problématiques. On pourrait également citer la collecte des eaux de pluie et la gestion des eaux usées des villages de Currumbin et de Kalkallo, le système décentralisé de réutilisation des eaux usées et pluviales de Central Park – qui est en passant la plus grande installation d’eau recyclée au monde intégrée dans le sous-sol d’un immeuble résidentiel – qui permet de fournir de l’eau à 2 000 appartements, 75 000 m² d’espaces commerciaux et au plus grand mur végétal de l’hémisphère sud. Le centre de recherche compte bien faire connaître et diffuser les bonnes pratiques expérimentées à l’aide d’outils d’analyses et de comparaisons mis à disposition et d’une équipe dédiée pour échanger. En dehors d’Australie, le modèle des WSC a pour le moment infusé dans la région du Grand Mekong (Vietnam, Laos, Thailand, Cambodge). De quoi inspirer jusqu’en France ?