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[Panorama Villes Durables] #3 La gestion des déchets, les clés de la réussite de Ljubljana

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La capitale de la Slovénie est en pointe dans plusieurs domaines liés à l’écologie. Elle est notamment reconnue pour avoir réussi là où de nombreuses grandes villes sont à la peine : la gestion des déchets. Retour sur 20 ans de bonnes décisions, entre volonté politique et adhésion des habitants.
La Slovénie et sa capitale Ljubljana trustent depuis une dizaine d’années les récompenses dans le domaine de l’environnement. Ljubljana a été élue capitale verte européenne en 2016 et la Slovénie a reçu la distinction de la destination la plus écologique au monde en 2018, en obtenant la note de 96/100 sur des indicateurs liés à l’environnement ou à la durabilité, faisant d’elle la reine du tourisme vert. Le pays est par ailleurs un écrin de biodiversité, 60% du territoire slovène est recouvert de forêts luxuriantes et plus de 40 parcs et réserves abritent 20 000 espèces végétales et animales. Mais s’il existe un domaine dans lequel la Slovénie excelle – Ljubljana particulièrement -, c’est celui de la gestion des déchets. La capitale est en effet régulièrement qualifiée de championne d’Europe en ce qui concerne les performances de tri à la source et de réduction des déchets, et est souvent prise en exemple par les autres métropoles européennes.

Un modèle efficace pour gérer les déchets domestiques

En une dizaine d’années, la métropole de Ljubljana (Ljubljana et 9 municipalités, soit environ 380 000 habitants) est parvenue à multiplier par dix son taux de collecte séparée des déchets organiques et recyclables, et à réduire la quantité de déchets envoyés en décharge de 59%. L’entreprise publique en charge de la gestion des déchets, la Snaga, affiche des résultats qui pourraient faire des envieux : 68% des ordures ménagères sont collectées séparément (contre 22% en 2007), et seulement 120 kg de déchets résiduels non valorisés générés par an et par habitant, contre 350 kg/an/habitant en Ile de France. La capitale ne souhaite d’ailleurs pas s’arrêter en si bon chemin. Elle s’est engagée d’ici 2025 à réduire encore de moitié cette quantité d’ordures résiduels, et à atteindre un taux de collecte séparée de 78%. La ville mène une vraie politique globale de réduction des déchets qui passe par l’optimisation dans le tri et la collecte et une réelle performance dans la revalorisation et le recyclage. Le tout, et cela à son importance, en ayant l’un des coûts de gestion des déchets parmi les plus faibles d’Europe. Mais alors comment Ljubljana réussit-elle depuis plus de 10 ans, là où la France arrive péniblement à mettre en place le tri à la source des biodéchets, pourtant censé entrer en vigueur à compter du 1er janvier 2024 (conformément au droit européen et à la loi AGEC de 2020).

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Le porte-à-porte comme clé de succès

Avant 2002, tous les déchets étaient traités de la même manière en Slovénie : mis en décharge. La transformation a eu lieu progressivement lorsque le pays est entré dans l’UE. Mais elle a été radicale. Dès 2002 la capitale met en place la collecte séparée du carton, du papier, du verre et des emballages dans des conteneurs installés sur le bord de la route. En 2006 la Snaga commence à collecter les biodéchets en porte-à-porte. Puis elle étend le modèle du porte-à-porte pour le papier et les emballages. Hormis dans l’hypercentre où la collecte s’effectue via des points de collecte enterrés de couleurs différentes invitant les habitants à trier leurs déchets, le modèle de collecte en porte-à-porte est généralisé à toute la métropole. Une fois le modèle déployé et compris par la population, la deuxième étape consiste à diminuer les fréquences de collecte des déchets résiduels, tout en maintenant celles pour les déchets recyclables et compostables. Bien entendu ces fréquences sont adaptées à la densité de population des quartiers. L’objectif ici est d’accompagner les habitants à trier leurs déchets plus efficacement. La sensibilisation a été primordiale. Car à Ljubljana, l’accès aux poubelles des déchets non recyclables et des biodéchets est payant, les autres étant gratuites. Un foyer devra s’acquitter d’environ 8€/mois. Zero Waste note dans un rapport que la diminution des fréquences de collecte ne s’est pas faite sans accrocs ni protestations de la part des habitants. Mais la Snaga a tenu bon dans sa stratégie tout en intensifiant sa communication par des campagnes de sensibilisation visant à embarquer la population. L’entreprise a également organisé des visites presse et pour le grand public afin de montrer et d’expliquer comment mieux trier ses déchets. Car une fois correctement triés, les déchets résiduels ne représentent qu’une petite partie des déchets.

Embarquer la population

Des déchetteries en périphérie de la ville et une collecte d’encombrants sont également à disposition pour tout déchets sortant de flux de porte-à-porte (déchets verts, matériaux dangereux, DEEE…). Les efforts ont payé et ont permis d’insuffler un changement de comportement des habitants. Mais la volonté a également été politique, puisqu’en 2014 le projet de construire un incinérateur a définitivement été enterré à mesure que les taux de collecte séparée et de recyclage augmentait. Ça a été un signal fort de l’engagement de la ville qui s’est d’ailleurs lancé dans la démarche Zéro Déchets à cette période. En revanche, le paquet a été mis dans le centre de traitement des déchets de la ville, le RCERO, qui est l’un des plus grands et des plus modernes d’Europe. C’est même un pilier central de toute la politique des déchets. En effet, ouvert en 2015, il permet de recycler 98% des ordures ménagères récupérées dans 58 municipalités en nouveaux objets, en compost ou en biocarburant. Le RCERO est également autonome en énergie et réinjecte jusqu’à 20% d’électricité dans le réseau. Ce centre de traitement des déchets ultra moderne a également permis à la population de mieux comprendre les enjeux et les bénéfices d’une économie circulaire.

Tendre vers le zéro déchets

Car c’est bien cela l’objectif à long terme. Petit à petit, la communication de la ville a évolué d’une sensibilisation au tri vers une sensibilisation pour une consommation plus responsable, à la prévention, à la lutte contre le gaspillage et à faire la promotion de la réutilisation. C’est une politique globale d’économie circulaire qui va au-delà de la simple collecte. Quelque soit le type de déchets, les emballages et le plastique à usage unique, les biodéchets , le textile ou les équipements électroniques, la municipalité met en avant pour chacun d’entre eux le fait de jeter le moins possible, tout en développant des stratégies pour mieux recycler et réutiliser. La capitale a fait des émules puisque seize municipalités slovènes ont rejoint le mouvement et se sont lancées dans une démarche zéro déchet.